Eric Chenaux

‘Say Laura’ est le septième album d’Eric Chenaux paru sur le label canadien Constellation (en co-production pour la première fois avec le label français Murailles Music. C’est peut-être son disque le plus clair, le plus limpide, le plus immédiatement poignant. Un disque aussi chichement outillé qu’à l’accoutumée: voix de tête, six cordes traitées à la façon d’un minuscule orchestre pris de boisson + cette mystérieuse petite batterie de pédales excentriquement reliées les unes aux autres et jouées comme d’un piano amphibie, histoire d’assurer les hallucinations et de faire passer, c’est marrant, les lanternes pour des planètes. Chichement outillé mais organisé plus picturalement que jamais au sein d’une architecture mouvante et aérée, où les couleurs miaulent dans le feutre quand chaque plan se voit tiré sans prévenir et sans objectif défini, comme autant de fusées somnolentes et rêveuses, lentes, si lentes, et lumineuses. C’est Cyril Harrison qui a enregistré, mixé, conçu la stéréo sphérique et ajusté la reverb jusqu’à ce qu’elle sonne comme depuis l’intérieur d’un œuf.

Eric Chenaux fait le meilleur rock n’roll sans en jouer le moindre. Les guitares les plus titubantes hébétées, drôlatiques et belles qui soient ondoient sur le beat maigre des pédales en court-circuit tandis que dans le chant miel-gingembre des chansons d’amour à trous renouvellent l’amour, renouvellent le trou.